Infinite RPG est un site de réseau social pour rôlistes que j’ai découvert par (Choupi) HyiHyil. Il avait déjà pratiqué par le passé un peu de RPG textuels (mode de jeu de rôle appuyé sur l’aspect narratif, qui peut se pratiquer par forums, mails, sms, Facebook…), le point de départ de Infinite RPG, qui s’est ensuite ouvert à toutes les formes de jeu de rôle, quelles qu’elles soient.
Le festival des Mondes de l’Imaginaire à Montrouge fut l’occasion pour nous de (re)nouer des liens, et depuis nous suivons de particulièrement près leurs activités et leurs projets, qui nous intéressent toujours.
Il se trouve qu’en ce moment, Infinite RPG a lancé une campagne de crowdfunding pour continuer à développer le site et ses activités. A cette occasion, la 2ème édition du concours « Vis ma vie de rôliste » a été lancée en parallèle, avec pour objectif de faire s’exprimer les rôlistes en tous genres sur leur passion et leurs pratiques – avec cette année un accent mis sur le thème de l’écriture.
L’occasion pour moi de revenir un peu sur mon parcours assez chaotique dans le jeu de rôle, et son impact sur l’écriture, qui n’est jamais loin !
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Donc moi, le jeu de rôle, je dirais que j’ai commencé à y toucher d’une manière assez détournée mais néanmoins pas si hors de propos que ça : par les Livres Dont Vous Êtes Le Héros (ldveh, ou ldvh).
Quand j’étais une collégienne fort timide et isolée à la campagne sans beaucoup d’amis, j’ai découvert ces livres-jeux chez un bouquiniste, et j’avais alors passé une bonne période à les enchaîner autant que je pouvais.
Ces romans modulables selon les choix à chaque fin de paragraphe, et pour la grande majorité parsemés de combats à gérer aux dés, sont déjà assez proches du concept du jeu de rôle sur table classique, de par leur nature autant qu’historiquement, puisque les plus connus sont de Steve Jackson et Ian Livingstone, les fondateurs de Games Workshop.
Comme beaucoup d’autres, je me suis donc acharnée à faire et refaire Le Sorcier de la Montagne de Feu, Le Labyrinthe de la Mort, La Cité des Voleurs et autres volumes de la série Défis Fantastiques, puis d’autres auteurs et d’autres séries…
Et pour les titres les plus coriaces, je m’étais rapidement mise à prendre des notes, essayer de dessiner des cartes et des plans, relever les infos les plus importantes pour faire les bons choix – et aussi carrément lister les numéros de mes paragraphes lus au fur et à mesure de ma progression, dans un premier temps pour pouvoir les comparer et changer de voies lors de mes nouvelles tentatives, puis, je l’avoue, pour remonter un peu en arrière et choisir l’autre embranchement en cas d’impasse ou de changement d’avis : c’était totalement de la triche, et je sais que ça en fait hurler plus d’un, mais j’assume !
Et donc, dans cette lancée, j’avais aussi entrepris d’imaginer la vie de mes héros après mes premières aventures, qui étoffaient leurs histoires personnelles, se réunissaient dans une sorte de guilde pour mettre en commun leurs objets trouvés, et leurs histoires de briscards au coin du feu (à bord d’une nef volante, tant qu’à faire, baptisée l’Alizarine).
J’avais donc déjà mis un pied dans l’engrenage avant même de le savoir…
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Ensuite, j’ai découvert Internet, et Harry Potter.
A l’époque, j’avais découvert par hasard un rpg textuel dans le thème de cette série de romans que je découvrais et adorais, et j’y avais participé quelques temps. Si je me souviens bien, c’était sur un newsgroup de MSN…
Et j’éprouvais déjà un certain malaise à voir la plupart des joueurs donner à leurs personnages des avantages exagérés et des profils disproportionnés, toujours à la limite voire même totalement à l’encontre du canon, de l’esprit de l’univers utilisé, dans lequel il est difficilement crédible qu’une jeune élève de première année débarque avec ses quinze chats savants, sa licorne Animagus et son loup ensorcelé, en gros.
Du coup, comme je commençais aussi à fréquenter quelques forums (sur Harry Potter, et l’écriture en général, vu que ça me titillait déjà), et que ça n’avait pas l’air bien compliqué de créer le sien sur une plate-forme spécialisée et gratuite, j’avais commencé à germer l’idée de créer mon propre espace de rpg Harry Potter, un rpg où le cadre serait original, qui changerait un peu des innombrables Poudlard alternatifs, et où tout serait fait pour que les personnages restent dans une dynamique suffisamment réaliste pour respecter l’univers général de Harry Potter, sans excès ni coups d’esbrouffe déplacés.
J’ai travaillé pendant des mois à la préparation de ce forum rpg, autant dans sa logistique et son système de règles que dans l’écriture de son background ou « BG », c’est-à-dire le décor général, la description des lieux et leur disposition, quelques éléments du passé de l’institution, les données de la situation présente et des sociétés magique et moldue à la période concernée, etc…
Et puis malheureusement, une panne m’a coupé de connexion internet pendant plusieurs semaines, et au retour je n’avais plus assez de temps à y consacrer et d’une manière plus générale j’avais le sentiment que le « bon moment » était passé.
Mon « domaine de l’Hyzgard » est tombé à l’eau avant même d’avoir réellement ouvert ses portes – mais j’en garde malgré tout un très bon souvenir, car j’avais passé un temps fou et passionnant à construire les bases d’un petit monde.
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Par la suite, j’étais devenue étudiante et je m’étais tournée plutôt vers les romans et les forums plus génériques, je dévorais à tous les râteliers et découvrais autant d’univers et de plumes qui me plaisaient.
En parallèle, j’étais aussi entrée dans le monde des fanfics, et j’y ai été assez prolixe pendant quelques temps. Là encore, mon fandom d’entrée et principal était celui d’Harry Potter, et je préférais lire et écrire des fictions mettant en scène des personnages secondaires plutôt que les principaux, développer des portes ouvertes confinant à l’anecdotique dans l’oeuvre de référence, et imaginer de l’inconnu sur un modèle connu…
Là aussi, j’estime que le jeu de rôle n’était pas très loin : mettre en scène un personnage secondaire dans une situation inventée et positionnée dans un univers bien défini, n’est-ce pas très proche de sa définition même ?
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D’autre part, pendant tout ce temps-là et même après, j’ai eu quelques occasions de tâter du jeu de rôle sur table – mais de manière plus qu’épisodique et assez lacunaire.
Une connaissance liée par le biais des ldvelh avait tenté de m’initier, avec une amie et sa compagne, mais en sous-estimant notre statut de novice et l’ambiance un peu guindée de la table, alors qu’il avait construit tout un scénario original dans les années folles, basé je crois sur Cthulhu.
Pendant un rassemblement IRL d’un forum, j’avais pu jouer à une mini partie dans l’univers de Trolls de Troy, que j’avais beaucoup appréciée mais dont le format m’avait un peu laissée sur ma faim et dans l’expectative.
Avec des amies, j’avais pu être initiée à In Nomine Satanis/Magna Veritas avec un scénario personnalisé aux petits oignons, au cours duquel j’ai d’ailleurs découvert ma nature profonde de fumbleuse (jets de dés ratés au pire possible), mais l’ancrage dans notre univers contemporain m’avait un peu déstabilisée, entre autres.
Encouragée par l’exemple d’une autre amie qui s’était lancée dans la masterisation d’un rpg textuel à thème Disque-monde croisé avec de multiples autres références – auquel j’avais d’ailleurs pris grand plaisir à jouer mon permier personnage de nain, le temps que la partie a pu tourner avant de s’essouffler par manque de participations régulières et rythmées, hélàs -, j’avais entrepris de préparer ma propre masterisation d’un essai de jeu de rôle sur table dans l’univers du Disque-monde, avec des règles inventées et très simples plutôt que le système indigeste de G.U.R.P.S. du jeu officiel, et en me basant uniquement sur la carte du monde et quelques connaissances géographiques et naturelles de cet univers… mais par manque de temps et obstination aveugle, j’avais largement surestimé mes capacités d’improvisation sur un scénario et un système à peine ébauchés, et cela n’avait pas eu grand intérêt.
Malgré ces rares expériences en pointillés, je restais intéressée par le jeu de rôle en général, je continuais à lire tout ce que je pouvais sur le sujet, à baigner dans quelques univers très liés (comme le Donjon de Naheulbeuk), et je gardais l’espoir d’y entrer vraiment et sérieusement dès qu’une occasion digne de ce nom se présenterait – malgré quelques hésitations bien compréhensibles.
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Comme la vie nous réserve parfois de ces surprises que l’on n’osait même plus attendre, c’est alors que j’ai rencontré mon compagnon, HyiHyil, qui se trouve être un joueur et rôliste invétéré.
En manque de table de jeu par défaut de joueurs, l’idée a germé de réunir quelques-uns de nos amis respectifs, puis communs, parmi les plus intéressés, quitte à jouer sur table virtuelle faute de pouvoir se retrouver autour de la même pizza (ou autre, c’est une image).
Nous avons fini par lancer notre petit groupe de joueurs, en commençant par une campagne Donjon de Naheulbeuk masterisée par HyiHyil, tous les autres joueurs étant novices, soit purement et simplement, soit avec trop peu d’expérience comme moi.
Je me souviens encore de notre proto-séance-zéro, affalés dans la chambre d’hôtel après une riche journée du festival des Imaginales…
Par la suite, de nouveaux joueurs ont rejoint le groupe – qui s’est vite baptisé la Compagnie des Baltringues, au vu de nos maladresses aux dés – et la campagne, et il nous a paru utile voire indispensable de rédiger un récapitulatif de ce qui s’était passé en jeu depuis le début, autant à l’usage des nouveaux intégrés en cours de route que pour ne pas perdre le fil de notre aventure.
J’ai donc pris sur moi de raconter les faits des premières séances dans un début de Journal, et à chaque fin de séance les volontaires tiraient aux dés qui se chargerait de rédiger le récit de la séance que nous venions de jouer (ce qui était récompensé de quelques xp). Nous avions le parti pris dès le départ de raconter les faits en RP uniquement, de sorte que le Journal lui-même soit totalement roleplay, sans considérations triviales (à part quelques clins d’oeil ou infos utiles et impossible à transcrire autrement) qui gâcheraient l’immersion, en se basant beaucoup sur la saga du Donjon de Naheulbeuk elle-même.
Cela m’a appris la prise de notes en cours de jeu, et j’ai beaucoup aimé aussi remettre en forme ces informations dans un support aussi immersif, tout comme de lire les contributions des autres joueurs, avec les points de vue de nos personnages et leurs caractères bien trempés (ce qui d’ailleurs n’était pas toujours si facile, notamment pour notre orque qui a bien dû faire l’objet d’une tolérance nécessaire).
Mais c’était déjà mettre la barre assez haut, comme je m’en suis rendue compte plus tard, et ce n’était pas toujours facile de respecter ce fonctionnement, à raison d’une séance de jeu par semaine…
Après quelques indisponibilités ici et là, quelques sauts de séances, puis un enchaînement d’imprévus et une certaine démotivation, la campagne s’est retrouvée entre parenthèses, laissée en plan.
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C’est alors qu’une de nos joueurs s’est proposée pour se lancer dans sa première masterisation, pour lancer une autre campagne plus souple en attendant.
Nous lui avons suggéré d’en profiter pour utiliser l’extension « Soldats », pour faciliter un peu la gestion du groupe selon les indisponibilités ponctuelles, et changer un peu de cadre.
Ainsi fut fait, et nous débutâmes la campagne de l’Escouade des Géraniums, avec des séances mieux délimitées et distinctes, bien qu’un fil rouge les relie efficacement. La notion d’enquête était également bien plus présente, car moins étalée dans les diverses péripéties et plus concentrée dans l’espace-temps, ce qui a été très intéressant aussi.
De plus, j’ai eu le grand plaisir de jouer une naine des montagnes du Nord, tandis que HyiHyil profitait du jeu de l’autre côté de l’Ecran de Meneur en tant que nain des montagnes de l’Est, ce qui fût très agréable à jouer.
Cette fois, c’est uniquement notre meneuse de jeu qui a rédigé les « rapports » de chaque séance, dans un style très roleplay également.
Et puis, là encore, les imprévus, le calendrier, la vie, des problèmes de santé aussi, ont fini par mettre également cette campagne en pause.
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Enfin, après une longue période d’indisponibilités diverses, HyiHyil a proposé de masteriser une nouvelle campagne. Après plusieurs sondages dans le groupe, il s’est lancé dans la préparation d’une campagne de Donjons & Dragons 4ème édition, avec un scénario personnalisé.
Le groupe s’est encore agrandi petit à petit, pendant les quelques semaines qu’il a fallu pour que chacun de nos personnages soit créé, que l’on apprenne à se familiariser avec nos fiches, et que tout soit prêt pour que la campagne soit réellement lancée.
Nous avons à peine commencé, et nous en sommes encore à une phase de découverte de ce système et cet univers de jeu, ce qui a jusque là impliqué systématiquement un combat par séance.
J’ai à nouveau pris sur moi de rédiger un récapitulatif après chaque séance, mais cette fois de manière beaucoup plus succinte et factuelle. Le but est bien sûr d’avoir une gestion de la campagne moins lourde, mais aussi de permettre un accès aux informations simplifié, ce qui n’est pas de trop pour nous autres presque-novices qui, pour la plupart, n’ont jamais pratiqué de jeu de rôle de ce niveau ou de ce système spécifique (notamment en prenant en compte la version/édition, si importante en termes de jeu de rôles).
C’est une autre forme d’écriture aussi, où penser en termes d’organisation, de lisibilité et d’ergonomie doivent prendre le pas sur le récit roleplay, qui ne disparaît pas pour autant mais doit être circoncis au plus court et au plus factuel, uniquement informatif…
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Dans tout ça, je concluerais que s’il y a bien une chose qui est et a toujours été liée à ma pratique du jeu de rôle quelle que soit sa forme, c’est l’écriture !
De différentes manières aussi, à divers degrés d’implication personnelle, mais l’écriture y a toujours sa place, une place relativement importante pour moi
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Cet article est publié dans le cadre du concours « Vis ma vie de rôliste » organisé par Infinite RPG.